Lettre à Claude

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Claude, tu n’es là que depuis 96h alors que je commence ce texte. Nous sommes mardi 08 octobre 2019, il est 19h37. Tu es arrivé un triste vendredi, en milieu d’après-midi, dans un spectacle des plus déplaisants. Roland Romeyer et Bernard Caiazzo, en quête d’un regain de popularité, ont lancé une opération reconquête des cœurs. Attaqués de toute part, ces-derniers ont cherché une union sacrée, non pas en rassemblant autour de ta personne mais au contraire en agglomérant les mécontents contre Ghislain Printant, qu’ils présentaient encore comme un choix idéal quelques semaines auparavant.

Ne nous attardons pas plus sur ce douloureux moment : ce n’est pas l’objet de cette réflexion. De ton arrivée dans le Forez, nous oublierons rapidement cette opération de communication dans tout ce que la communication a de détestable pour chérir ce que tu as réussis en seulement quelques heures.

Deux ans d’attente plus tard…

Le résultat le plus immédiat est incontestablement cette victoire acquise dans le derby. Certains se plaisent à répéter qu’un derby ne se joue pas mais se gagne. Je suis sûr que cela te chagrine et que la manière dont fût acquise la victoire ne te satisfait pas le moins du monde. Tu l’as d’ailleurs avoué à demi-mot à la fin du match, rappelant que « cette victoire ne doit pas occulter le travail qu’il reste à faire« .

Gagner un derby est une émotion intense, surtout lorsque le scénario te l’offre à la 90e minute. En revanche, doit-on exhumer la merveilleuse sensation de maîtriser un derby dans le jeu et de ne jamais craindre pour le résultat tant la supériorité est visible sur le terrain ? Certes, ce serait faire les fines bouches après deux ans et demi de disette. Notre dernière victoire à domicile remontait à une éternité : Christophe Galtier était encore en poste ! Un soir de février 2017, l’affaire était pliée avant la demi-heure de jeu. Ce fut ensuite le pire derby de l’histoire avec une humiliation sans précédent (0-5).

Il est piquant de se dire que ton arrivée à l’AS Saint-Etienne est le fruit de ce malheureux derby. Arrivée tardive, certes (quasiment deux ans après), mais le résultat est pour une fois plus intéressant que le désagréable enchainement d’évènements qui t’a conduit ici. Ton histoire avec l’ASSE est irrémédiablement liée à ce match à la saveur particulière, ce match qui nous obsède et dont notre seule envie est de le voir recommencer dès que l’arbitre en siffle la fin. Tu es venue grâce à lui, avant lui, pour lui : comment mieux sceller notre alliance ?

A l’horizon, de l’espoir

Alors que l’on louait la relative stabilité stéphanoise avec le long passage de Galtier dans le Forez (2009-2017), le bateau forézien s’est embarqué dans les turbulences : depuis son départ, ce sont pas moins de 4 entraineurs en 2 ans qui se sont succédés à la tête du club. D’espoirs déçus (Oscar Garcia) en catastrophe annoncée (Julien Sablé), de scepticisme vite enterré (Jean-Louis Gasset) en désespoir confirmé (Ghislain Printant), rien ne nous fût épargné en quelques mois.

Toutefois, cela est désormais derrière nous. Depuis des années, nous réclamions « un bâtisseur » pour le club. Le profil était des plus faciles à dresser : il nous fallait un homme à poigne afin de pouvoir imposer ses choix à une structure qui ressemble davantage à un pont vacillant qu’à une colonne vertébrale valide. Pour coller au club, un entraineur capable de lancer des jeunes joueurs était un critère indépassable. Afin de professionnaliser un club encore empreint d’amateurisme, l’expérience du haut niveau et la compétence nécessaire pour endosser des responsabilités élargies ne devaient pas faire défaut.

Ce portrait, Claude, c’est le tien. Malgré ton passé lyonnais que nous te pardonnons allègrement (après tout, personne n’est parfait), tu es l’homme idoine pour l’AS Saint-Etienne. Ta venue nous réjouit à plus d’un titre : elle annonce que le club est encore assez attractif pour qu’un très bon entraineur accepte de se mouiller et mette sa réputation en jeu chez nous. De plus, tu clames être un homme de projet, proclamant que tu t’impliques profondément partout où tu passes. C’est exactement de cela que nous avions besoin.

Après un tourment sans fin, c’est au tour d’un vertige de l’espoir de nous submerger. Voir un entraineur que l’on admire, dont toutes les interview sont une bouffée d’oxygène dans un foot français sclérosé par la paresse intellectuelle, est un bonheur que je n’avais jamais encore éprouvé. Cela fait déjà plusieurs saisons que je me prenais à rêver de ton arrivée à l’ASSE.

Avec ta venue, c’est l’assurance d’enfin voir mon équipe pratiquer un jeu alléchant. Depuis trop longtemps, les matchs de l’ASSE sont une injure au football. Alors que je me sentais décrocher, mais toujours obligé par une force irrationnelle, à m’infliger les rencontres de Saint-Etienne, je suis à nouveau, et peut-être pour la première fois, impatient de voir le jeu que va produire mon club de coeur.

Merci d’avance

Je place en toi toute ma confiance. Je n’ose penser au jour où tu quitteras le club et où nous devrons alors te trouver un successeur. De ton passage qui sera bien trop court à mon avis, j’espère que tu apporteras à l’ASSE une refonte totale. Tu en as les pouvoirs, les compétences et les responsabilités.

Alors, pour tout cela et plus encore, merci d’avance, Claude Puel.

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